> Allocution de François Mitterrand à l'occasion de la remise des insignes de Commandeur dans l'Ordre National du Mérite à Georges Montaron

Georges Montaron, vous aussi journaliste, journaliste dans l'âme. Nos voies se sont croisées bien souvent depuis la guerre et dans la guerre. Votre journal Témoignage Chrétien, celui auquel vous avez consacré une large part de votre vie, est né de la Résistance et je me souviens des longues conversations avec le Père Chaillet qui fut son fondateur. Vous étiez l'un des dirigeants nationaux de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne et vous êtes resté très attaché à vos origines. Jeunesse: vous aimez les jeunes, vous le montrez dans vos articles. Ouvrière: vous avez toujours été du côté de ceux qui travaillent et qui travaillent durement pour des salaires souvent exagérément modestes. Et vous êtes de leur côté à chaque fois qu'il le faut et cela arrive assez souvent. Chrétienne: vous l'êtes, enfin je suppose, à votre façon. C'est à dire ce que j'ai moi même appris lorsque j'étais enfant de se placer avant tout au service des autres. Ce que vous avez fait quand même beaucoup plus que moi. Et vous l'avez fait dans différents journaux très connus. Et je disais à votre manière parce qu'il me semble que la spécialité de Témoignage Chrétien c'était quand même d'avoir quelques appréciations qui n'étaient pas forcement et je n'en dirai pas davantage celles de la hiérarchie, ce qui n'enlève rien à votre sens de la discipline quand on appartient à l'Église. C'est ce qu'il faut faire du moins c'est recommandé. Vous êtes à Télérama, vous êtes dans beaucoup d'autres journaux. Je sais que vous vous êtes occupé beaucoup de syndicalisme, au Syndicat de la Presse Hebdomadaire Parisienne : vous y avez pris toutes les fonctions, jusqu'à celle de Président. Vous êtes intéressé à la vie ouvrière, vous vous êtes intéressé à la vie matérielle des journaux, vous êtes Président de la Coopérative d'approvisionnement de papier pour les magazines et vous êtes également membre et grand dirigeant des Messageries. Tout ceci relève généralement d'une élection, du choix par les autres.

Vous faites partie de ceux qui à l'origine sont venus de notre région, que je connais bien, d'une famille morvandelle, ce qui me va droit au cœur. Vous n'y étiez plus quand je suis arrivé et moi j'y suis resté. Mais vous n'oubliez pas ce que vous devez à ce pays auquel est lié votre nom, auquel est lié votre famille et là encore je vous retrouve tel que vous êtes, fidèle aussi. Là ou il faut être quand il s'agit de témoigner.

Dans Témoignage Chrétien vous témoignez en toutes circonstances pour les causes humaines qui vous paraissent importantes. D'ailleurs vous avez publié un livre "Le Socialisme". Je ne suis pas absolument sûr que c'était le mien! Mais ce qui fait son intérêt c'est le type même d'idée ou d'idéologie auquel chacun porte à lui tout seul: le saint sacrement. Il y a donc pratiquement des variétés qui viennent d'individus ce qui est très rassurant pour le Socialisme. Et puis vous avez écrit un livre dont le nom se suffit à lui-même "Jérusalem en Palestine". On peut déjà lire un certain nombre de vos articles rien qu'en lisant ce titre. Enfin votre livre, peut être le plus personnel, qui s'appelle "Quoi qu'il en coûte". J'ai le sentiment pour vous journaliste, comme pour vous même que c'est le plus beau titre que vous puissiez prendre pour signifier vos engagements: quoi qu'il en coûte. Moi, il ne m'en coûte rien de vous remettre ce soir sinon avec beaucoup de plaisir la distinction qui vous a été accordée.

Georges Montaron, nous vous faisons Commandeur dans l'Ordre National du Mérite..

François Mitterrand, Président de la République,
jeudi 31 mars 1994, Paris, Palais de l'Elysée

 

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